« La ressemblance avec des personnages ayant existé n’est pas fortuite». Voilà ce que l’on pourrait aujourd’hui lire au générique des grands succès du box office. En effet, les producteurs se battent désormais pour faire rimer personnages et réalité. La mention « basé sur une histoire vraie» fait recette. Et pour dénicher l’histoire idéale, les producteurs s’arrachent les droits d’adaptation de faits bien réels.
- 1 million de dollars pour Gorge profonde
En 2005, Mark Felt, ancien numéro 2 du FBI, avoue être « Gorge profonde », le mystérieux informateur qui tuyautait deux journalistes du Washington Post dans l’affaire du Watergate, scandale politique qui conduit le Président Nixon à démissionner en 74. Cette révélation met le Tout-Hollywood en ébullition. Au terme d’une lutte acharnée entre les majors, Universal s’empare des droits d’adaptation du livre confession de Mark Felt. Montant de la transaction: 1 million de dollars. - Quand le champion du box-office exploite le filon
Steven Spielberg est ainsi passé maître dans l’art subtil d’adapter des vraies vies sur grand écran:
En 2003, le réalisateur raconte, dans Arrête-moi si tu peux , l’incroyable parcours de Franck W.Abagnale (incarné par Leonardo Dicaprio), l’un des escrocs américains les plus célèbres du XXème siècle. Dans les années 60, cet adolescent s’est joué des grandes banques américaines en menant une vie de millionnaire au compte de la PanAm. Mais à la différence du film de Spielberg, Frank W.Abagnale évoque dans son livre des aspects bien plus sombres de sa vie comme la violence des prisons. L’ancien arnaqueur est aujourd’hui consultant à l’académie du FBI.
Un an plus tard, Spielberg récidive en réalisant Le Terminal . Cette fois, il choisit de porter à l’écran la vie de Mehran Karimi Nassiri, un réfugié Iranien qui débarque à Roissy en 1988 sans aucun papier. Pendant de longues années, ce naufragé des temps modernes vit au milieu des voyageurs, coincé entre une pharmacie et un magasin de vêtements. Pour quelques dizaines de milliers d’euros placés sur un Livret A, Mehran cède ses droits à Dreamworks. En s’inspirant de la vie du réfugié Iranien, le réalisateur américain s’autorise quelques libertés avec la réalité des faits: l’intrigue est transposée à l’aéroport JFK à New-York, le héros rebaptisé Viktor Navorski et son pays d’origine imaginé. Il passe sous silence les incroyables péripéties administratives de Mehran à travers l’Europe. Aujourd’hui, Mehran a perdu les pédales et le cinéma n’a pas changé sa vie.
1Cinéma: Hollywood adore les histoires de vrais gens (suite)
- Huit scénarios pour Les Survivants
En 1972, un avion s’écrase au cœur des Andes, à 3500 mètres d’altitude, la plupart des 44 occupants survivent miraculeusement. Pour survivre, les rescapés décident de se nourrir de la chair de leurs compagnons décédés, Le récit des survivants de leurs 70 jours passés dans des conditions effroyables bouleverse le monde entier et passionne Hollywood. L’histoire inspira pas moins de huit scénarios. Ridley Scott (Alien, Gladiator, Thelma et Louise, etc.) fut à deux doigts de le réaliser.
C’est finalement la Paramount et Disney qui s’associent pour produire Les Survivants. - Dr Romand ou l’engrenage du mensonge
En 2002, Nicole Garcia adapte dans L’Adversaire tiré du récit d’Emmanuel Carrère : il raconte l’incroyable imposture de Jean-Claude Romand.
Pendant dix-huit ans, cet homme se fait passer pour un médecin, chercheur à l’organisation mondiale de la santé (OMS). Mais Romand n’a jamais dépassé le stade de la deuxième année de médecine. En 1976, il échoue pour quelques points à l’examen de passage en deuxième année, mais fait mine d avoir réussi. L’engrenage du mensonge est enclenché. Chaque année, entre 1975 et 1986, il assure ses arrières en se réinscrivant douze fois à la faculté de médecine sans jamais passer les examens.
Sa double vie n’est qu’une suite interminable de mensonges. Il passe ses journées sur des aires d’autoroutes, tue le temps en avalant les kilomètres de bitume au volant de sa berline.
En 1993, il tue sa femme et ses deux enfants, puis ses parents et son chien. Romand s’explique : « Parfois, on peut dire un mensonge pour faire plaisir, pour voir la joie dans les yeux de l’autre. C’est ce mensonge qui est à l’origine des cinq morts ». En juillet 1996, Jean-Claude Romand est condamné à perpétuité. - Un Mesrine très convoité…
Jean-Paul Belmondo
est le premier à s’intéresser à « L’instinct de mort ». Le 28 Mars 1977, trois semaines après sa sortie de son livre, Jacques Mesrine lui cède ses droits pour 500 000 francs.
Le scénario, confié à Patrick Modiano et Michel Audiard, est présenté à Mesrine, alors emprisonné à la Santé.
Sa réaction : «em>Ne mettez pas le mot fin, ce n’est pas fini !». Il s’évade quelques jours plus tard…
Plusieurs metteurs en scène sont sollicités, dont Georges Lautner, Yves Boisset, Costa-Gavras, Alain Corneau. Mais tous refusent. Seul Jean-Luc Godard se déclare partant, mais, cette fois-ci, c’est Belmondo qui bloque. Les points de vue du réalisateur et de l’actreur diffèrent, le projet tombe à l’eau.
En 1983 André Génovès réalise un Mesrine avec Nicolas Silberg. Sans Belmondo.
Il faut attendre 2002 pour que Thomas Langman reprenne le projet à son tour, il achète les droits des deux livres,em> L’Instinct de mort etem> Coupable d’être innocent , pour 350 000 €. On connaît la suite : c’est Vincent Cassel qui est choisi pour incarner Mesrine. Six ans plus tard c’est dans la boîte.